L’Europe, grande absente de la campagne

Contrairement à l’Allemagne, où l’élection de Martin Schultz à la tête du SPD a quelque part placé l’Europe au cœur de la campagne, en France, la timidité des candidats sur la question est édifiante.

Bien sûr, l’Europe est présente dans les programmes, la sortie pour les uns, des aménagements pour les autres. Mais aucun ne semble être audacieux sur la construction du projet politique européen.

La question monétaire

L’euro est bien plus commenté que l’Europe ! La monnaie unique fait l’objet de l’attention européenne des candidats ; pour l’extrême droite comme pour Mélenchon, elle reste l’ennemi public numéro 1. Hamon, lui, veut doter l’eurozone d’une assemblée parlementaire. Bonne idée sur le papier, mais c’est encore assujettir l’Union Européenne à sa monnaie et non l’inverse. Les grandes erreurs de la construction européenne sont pourtant étroitement liées à son dimensionnement économique disproportionné.

Les candidats eurosceptiques, voire europhobes, en particulier J.L Mélenchon et M. Le Pen, voient la crise économique à travers l’unique prisme monétaire. Grossière erreur, la France est un pays massivement déficitaire du point de vue de sa balance commerciale à cause des faiblesses ontologiques de son organisation économique, notamment sur l’industrie. Étant massivement déficitaire, la monnaie unique est un avantage non négligeable car elle garantit l’énergie à un prix moindre, l’accès aux biens de consommation importés et l’Union Européenne lui permet d’exporter dans l’eurozone, notamment en Allemagne (acier, équipementier automobile, plasturgie, etc.).

Une europhobie qui ne dit pas son nom

J.L Mélenchon souhaite une autre Europe, pourquoi pas ! Mais sa position de changer ou quitter l’Europe implique un rapport de force insoutenable pour quiconque se voudrait démocrate (en même temps, quand on soutient Poutine et Assad…). On peut légitimement se demander s’il ne souhaite pas une Europe a minima bâtie sur une intergouvernementale forte, plutôt que sur la légitimité des Parlementaires Européens, seuls représentants du Peuple Européen.

Son cas n’est pas isolé. Derrière de nombreux critiques de la construction européenne se cachent des europhobes, nationalistes convaincus. Sans doute Mélenchon, Dupont Aignan, Fillon et Le Pen seraient plus enthousiastes à l’idée d’une alliance économique avec la Russie, qui attire de par son autoritarisme politique et son opposition à l’alliance atlantique, plutôt qu’avec l’Allemagne, un pays qui, il faut le rappeler, demeure un partenaire économique plutôt qu’un concurrent, et qui possède une démocratie éprouvée.

Le problème Macron

Emmanuel Macron pose un réel problème : il est un europhile convaincu. Cependant, Emmanuel Macron n’a rien du commun des mortels, celui qui, comme vous et moi, doit travailler d’arrache-pied pour gagner un salaire souvent insuffisant à la société moderne. Emmanuel Macron, grâce à son passé de banquier, reste un néo-libéral dont la réputation est intimement liée aux lois « Travail » et « Macron », donc pas réellement un candidat sexy pour « les masses populaires ».

En ayant le programme le plus europhile, il le torpille, sans le savoir, liant l’Europe, une fois de plus, avec un libéralisme débridé, destructeur d’emploi, d’environnement, de bon sens et de vie harmonieuse. Pas de quoi remettre le projet européen en marche…

Trésorier at EIBS | antoinealexandre@ei-bs.eu

Co-fondateur d'EIBS en 2010, je chronique l'Europe, sa politique, sa construction et son évolution.

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